Les éléments constituants un jeu

Ces éléments (tiré de http://www.engin.umd.umich.edu/CIS/course.des/cis587/if-f02.html — le lien n’existe plus) peuvent constituer une piste de réflexion pour le design d’un jeu. Bien entendu, cela n’est pas forcément à prendre au pied de la lettre, ni à intégrer dans tous les points évoqués, mais cela permet de garder à l’esprit certaines constantes :

« A well-designed game will exhibit the characteristics listed below.

  • Competence: the game should handle the user interactions expected for a piece of interactive fiction.
  • Immersiveness: the degree to which a player loses him or herself in the game world.
  • Completeness: the world should have a reasonable number of room and objects.
  • World Design: non-linear story with several puzzles to solve.
  • Prose Quality: the room descriptions should draw the player into the game.
  • Interactivity: the player should have interesting objects and environments to manipulate.
  • Fun – the game should entertain the player and motivate him or her to play often. »

Ce que l’on pourrait traduire par :

  • Compétence : le jeu doit prendre en compte les interactions du joueur inhérentes à une fiction interactive.
  • Immersion : le degré auquel le joueur se sent immergé dans le jeu.
  • Richesse : le monde devrait avoir un nombre raisonnable d’endroits et d’objets.
  • Conception du monde : une histoire non linéaire avec différentes énigmes à résoudre.
  • Qualité de la prose : la description des endroits devrait attirer le joueur dans le jeu.
  • Interactivité : Le joueur devrait avoir des objets et un environnement intéressants à manipuler.
  • Amusement : L’œuvre devrait divertir le joueur et le motiver à jouer souvent.

La combinatoire des fictions interactives

Tiré de http://hypermedia.univ-paris8.fr/jean/articles/litterature.html.

« À ce découpage du texte en unités, il faut ajouter le dispositif qui les articule et les met en fonctionnement. Celui-ci peut prendre des formes très diverses, qu’il s’agisse de conventions ou de mécanismes. Cela peut aller de la simple fonction aléatoire (prendre une carte au hasard) à un jeu complet d’instructions (un programme informatique). Ces fonctions, que l’on peut qualifier de transversales, combinent un certain nombre de caractéristiques :

  1. La linéarité. Un texte non linéaire n’aligne pas ses modules dans un ordre fixe, temporel ou spatial, mais dans un ordre arbitraire, déterminé par un agent cybernétique (le(s) utilisateur(s), le texte, ou les deux.)
  2. Le dynamisme. Dans un texte statique, les modules sont toujours identiques tandis que dans un texte dynamique leur contenu peut changer.
  3. Le déterminisme. Quand le dispositif assigne toujours la même place respective aux modules, le texte prend un caractère déterminé. Sinon, il reste indéterminé.
  4. La temporalité. Elle peut jouer un rôle important en faisant dépendre l’apparition des modules de l’écoulement du temps passé devant la machine par l’utilisateur.
  5. La manœuvrabilité. L’accès au texte sera plus ou moins facile selon qu’il sera aléatoire ou se fera par l’intermédiaire d’un lien hypertextuel qui pourra être explicite, caché, conditionnel ou arbitraire.
  6. L’interactivité. Celle-ci peut prendre plusieurs formes : exploratoire, quand le lecteur décide du chemin à suivre; dramatique, quand le lecteur est appelé à assumer le rôle d’un personnage dans l’univers de fiction décrit par le texte ; configuratives, si le lecteur peut choisir les modules et/ou les fonctions transversales ; poétique quand les choix du lecteur sont esthétiquement motivés.

L’univers de jeu

Quelques pistes :

Conseils à un jeune auteur

Par JB

[…] Selon Graham Nelson, « [i]l y a un paradoxe dans les jeux d’aventure. Un individu, dans la vie réelle, souhaite avoir le moins de problèmes possibles. Or, son grand plaisir est de jouer à des jeux d’aventure, donc, paradoxalement, de se s’autoposer des problèmes gratuitement. Pour quelle raison ? »

Je t’invite à jouer à des jeux d’aventures, et à trouver pourquoi tu adores ça. Si tu détermines pourquoi, tu pourras reproduire ce plaisir dans tes créations. Et d’autres personnes comme toi apprécieront la générosité que tu as eue de partager cet effort de restitution.

Enfin, comme le dit également Andrew Plotkin, construis ton univers l’esprit libre d’énigmes et de jeu. Trace éventuellement une carte, mais pas avec des pièces, une vraie carte. Réfléchis aux personnages, pourquoi on a envie de les aimer ou de les détester. Car un personnage pour lequel on a pas d’émotion, c’est un meuble.

Une fois que tout cela aura pris corps, et bien les énigmes arriveront toutes seules. C’est d’ailleurs très logique : si tu imagines que ton héros aime les poissons, tu peux imaginer une scène avec une visite d’un aquarium, qui peut donner lieu à beaucoup d’ambiance et d’énigmes. […]

Par Otto

[…] Lire « How to Write a Great Game » (en anglais).

Il y a également un chapitre sur le manuel d’Inform 6 consacré à la création de jeu : The Craft of Adventure (JB l’avait déjà cité).

Souvent, les jeux amateurs se focalisent sur les lieux, mais pas sur les scènes : le jeu a un espace, mais pas de temps (ou très peu). En effet, de par la conception des systèmes de création, il n’est pas évident (mais pas impossible, évidemment) d’avoir des lieux qui changent en fonction des scènes : si a un moment le temps évolue et des événements qui modifient les lieux surviennent, il est nécessaire de recoder presque entièrement ces lieux. Donc, soit on fait évoluer le joueur dans des lieux sans possibilité de revenir (en lui faisant découvrir de nouveaux lieux, un peu comme dans Ekphrasis), soit on arrive à faire des descriptions différentes en fonction du déroulement du temps. […]

Comment écrire un bon jeu

Ces conseils ne sont pas forcément à prendre au pied de la lettre, mais ils peuvent donner des pièges à éviter et une direction possible de réflexion.

Court résumé à partir de « How to Write a Great Game » (« Comment écrire un bon jeu ») :

Construction

  • Carte du monde :
    • Pas trop d’endroits, mais suffisamment quand même, sorties et puzzles connectés par des combinaisons d’objets ;
    • Éviter les lieux qui n’ont pas d’intérêt, placés là seulement parce qu’ils existent en vrai ;
    • Vérifier la taille des lieux pour que cela soit cohérent ;
    • Éventuellement, essayer de montrer des pièces non accessibles depuis un autre lieu, ce qui provoque une récompense lorsque le joueur arrive à résoudre l’énigme du premier lieu ;
  • Carte de l’histoire :
    • Avoir des scènes, connectées par des transitions, trames de l’histoire ;
    • Les garder simples et percutantes pour ne pas noyer le joueur ;
    • Donner des parties de l’histoire au joueur par petits bouts pour éveiller son intérêt ;
    • Utiliser les PNJ à bon escient.

Interaction

  • Inciter le joueur à participer au jeu :
    • Trouver un titre accrocheur, un résumé appétissant ;
  • Soigner l’introduction :
    • Ne pas tout donner dans l’introduction, pour donner envie au joueur de continuer et pour ne pas faire une introduction trop longue ;
    • Donner un petit travail simple au joueur au début du jeu, cela l’encourage à continuer ;
  • Garder le joueur en éveil :
    • Lui donner des indications sur le but du jeu, ne pas le noyer dans des concepts trop étrangers ;
    • De plus, veiller à lui donner un monde qui répond correctement à ses interrogations : les objets évoqués dans les descriptions doivent être définis dans le jeu comme des objets (ne pas oublier les synonymes) ;
    • Les verbes spéciaux évoqués dans les descriptions doivent être supportés dans la grammaire du jeu, en plus des verbes conventionnels. À l’inverse, si un verbe compliqué doit être tapé par le joueur, il doit être anticipé par avance ;
  • Faire bêta-tester le jeu et le retravailler à partir des transcriptions des bêta-testeur. Demander aux bêta-testeurs le temps passé à jouer ;
  • Avoir ces verbes de base : >INFOS, >AIDE, >INDICE, >CREDITS.

Concept

  • Le concept est comme la couverture d’un livre : il donne l’envie de jouer, des informations sur le jeu, et aide à former la trame et la structure de l’histoire.
  • Le concept, même le plus simple et simpliste, devrait contenir la phrase : « la partie intéressante est que… ». Cette partie spécifique et propre au jeu devrait être travaillée au maximum pour obtenir un jeu mémorable.
  • Ce concept peut-il se suffire à lui-même tout le long du jeu ? Évite-t-il les banalités et les répétitions des jeux antérieurs ? Si non, qu’est-ce qui fait qu’il se démarque malgré tout des autres, quelle est sa « partie intéressante » ?
  • Un jeu sans grand concept peut malgré tout être captivant. Mais pour être mieux que cela, il faut un bon concept, travaillé jusqu’au bout.

Inspirations, combinatoires, fins de jeux

  • Avis à tous les auteurs : ce site recense les structures, propriétés, caractéristiques, clichés (même s’ils s’en défendent…), stéréotypes, lieux communs (de façon péjorative ou non) propres aux fictions : Ceci est bien entendu exploitable, comme matière première, dans toutes les histoires que nous pourrions avoir à écrire.
  • Combien de fins pour mon jeu ?

Créer une couverture

Une belle couverture, outre le plaisir de l’avoir réalisée soi-même, c’est aussi une meilleure visibilité pour vos joueurs potentiels. Cela permet de s’afficher sur d’autres sites, de donner quelques indications sur le contenu du jeu en présentant certains éléments qui se retrouveront dans l’histoire, ou simplement de faire une couverture abstraite pour ne pas dévoyer le sens imaginatif des jeux textuels.

Pour créer les couvertures de vos jeux, quelques conseils pratiques :

La taille des images

Selon le manuel d’Inform 7, au niveau des couvertures, il est préconisé d’utiliser une image carrée det 960 pixels de côté. Cette taille permet de pouvoir imprimé la couverture au format CD-ROM sans perte de qualité.

Le contenu

Indiquez l’auteur et le titre du jeu. Essayez de faire des images contrastées et percutantes.

Voici des exemples :

La source des images

Vous pouvez utiliser n’importe quelle source, dessin, photo ou autre, mais il devez éviter les images sur lesquels vous n’avez aucun droit (images sauvagement repiquées sur internet).

Vous pouvez utiliser Flickr, qui est une bonne source d’image. En allant dans la recherche avancée de flickr : http://flickr.com/search/advanced/ vous pouvez sélectionner l’option : Only search within Creative Commons-licensed content + (eventuellement) Find content to use commercially + (obligatoire) Find content to modify, adapt, or build upon Ce qui vous permettra de créer une couverture avec des images légalement modifiables et réutilisables (éventuellement dans un contexte commercial si vous avez coché l’option). (L’interface de Flickr a changé entre temps donc ce n’est plus valide aujourd’hui.)

Attention, car la licence CC-BY-SA impose de ne pas faire obstruction au nom de l’auteur original, aussi veuillez faire apparaître le nom ou le lien de l’endroit où vous avez trouvé l’image. Vous pouvez les inclure dans les commentaires de l’image (gimp permet cela par exemple)

Suggestions d’outils :

  • http://www.gimp.org : logiciels libre permettant d’éditer des images bitmap.
  • http://www.inkscape.org : logiciels libre permettant d’éditer des images vectorielles.

Créer une transcription

Maintenant que vous avez créé votre jeu, il faut le faire bêta-tester par des joueurs. Demandez-leur de commencer la session de test par la commande « script on », qui aura pour effet d’enregistrer toutes le texte affiché par le jeu dans un fichier externe (un emplacement sera demandé). Il est possible d’ajouter des commentaires durant le jeu (orthographe, problèmes, etc.) en commençant une commande par un astérisque suivie d’une espace. Enfin, à la fin du jeu, le joueur peut taper « annuler », puis « script off », ce qui enregistrera le résultat de la transcription, que l’on peut envoyer au créateur du jeu.

Pour l’auteur, lire le cheminement du joueur permet de se rendre compte des limitations du jeu (descriptions manquantes, tâtonnements du joueur, résultats illogiques…) ; en recherchant les astérisques dans le document, il arrive directement aux commentaires les plus importants.

On pourra également tirer parti de cet outil en ligne pour améliorer la présentation du transcript : http://www.nitku.net/if/beautifier/ . Il faudra ajouter les lignes :

  • Vous ne pouvez voir une telle chose ;
  • Vous ne voyez rien d’intéressant ;
  • Vous ne voyez rien de tel.

Diverses réflexions, par Azathoth

Typologies

  • Ce que peut être un « endroit » :
    • Un lieu (connecté spatialement à d’autres) ;
    • Un « interlude » (par exemple, un rêve où le joueur peut agir, mais qui ne dure que quelques tours avant qu’il ne soit téléporté à nouveau dans son endroit d’origine) ;
    • Un menu ;
  • Quêtes « structuralistes » : établir une liste d’éléments structurels :
    • Le commanditaire :
      • Volontaire (client de tueur à gage) ou involontaire (personne agressée dans la rue) ; Dieu (tremblement de terre) ; le joueur lui-même ;
    • L’objet :
      • Une personne ;
      • Un objet ;
  • Distinction fondamentale :
    • Le jeu textuel : l’interface est textuelle mais le texte n’est pas l’objet même du jeu, ni d’un point de vue informatif, ni d’un point de vue poétique ;
    • La fiction interactive : le texte EST l’objet du jeu ;
  • Distinctions concernant les JDR/jeux d’aventures textuels/FI :
    • Importance plus ou moins grande des dialogues et du relationnel avec les PNJ (PNJ « vivants » ou plus « utilitaires ») ;
    • Jeu subjectif (centré sur les pensées, le vécu, les émotions du personnage) ou objectif (absence de ces thèmes) ;
    • Programmation centrée sur une simulation réaliste d’un monde ou centrée sur la narration interactive ;
    • Linéarité/Liberté relative/bac à sable ;
    • Toutes les actions disponibles immédiatement/Panel d’actions augmentant au fil de la partie.

Injonctions

  • Permettre au joueur de se faire plaisir « en étant juste là » (soigner les éléments d’ambiance mais aussi les éventuels sons ou autres) en accomplissant certaines actions gratuites (appropriation du monde par le joueur), voire créatives (écrire des poèmes, jouer de la musique — exploiter les possibilités multimédias et de l’aléatoire) ;
  • Bannir les difficultés excessives ou malhonnêtes — les mystères à résoudre ne sont pas là pour humilier le joueur et prouver l’intelligence du concepteur. On ne devrait jamais « agir au hasard » dans le jeu pour trouver la solution à un problème ;
  • Un objet nécessaire dans la progression d’une partie, sauf s’il est « en soi » unique (la Joconde) devrait être disponible en plusieurs exemplaires dans le jeu (par exemple dans une armurerie OU à voler à un garde OU à acheter légalement si on arrive à obtenir un permis OU à acheter au marché noir, etc.) ;
  • Un objet que l’on doit, par exemple, cacher, doit être « cachable » absolument partout : sur soi, dans un pot de fleur, sous son pied, dans les fourrés, etc. Avec plus ou moins de chances de réussite, selon la cachette, mais quand même ;
  • On devrait pouvoir s’enfuir en courant, briser la nuque d’un fâcheux, le corrompre ou le convaincre ;
  • Nécessité d’une quête principale. Et d’une BONNE histoire. Dans tous les jeux. Pas de quête : aucune raison de jouer. Ceci étant, il ne faut pas NON plus brusquer le joueur. Une mission secondaire peut être limitée dans le temps. La quête principale, dans l’idéal, doit être réalisable sans limite de temps, en laissant le temps au joueur de progresser à son rythme, de se promener, de s’occuper de trucs mineurs, etc. ;
  • Ne pas permettre que trop de quêtes se chevauchent en même temps. Plus il y a d’unité d’action, mieux c’est.
  • Le personnage-joueur n’est pas le centre du monde et il n’y a aucune raison que les PNJ lui demandent spontanément de résoudre leurs problèmes.